Chapitre X.Entretien du Sabre

Pourquoi et Quand ?

L'entretien est une étape importante de la vie du sabre .
Bien sur , aujourd'hui , on ne se bat plus avec cette arme mais les matériaux qui le composent sont tous d'origine naturelle et sont tous démontables manuellement sans l'usage d'aucun outil destructif .

Il circule beaucoup d'avis concernant le nettoyage d'un sabre . Il dépend surtout de l'usage que l'on fait de sa lame .
Une lame d'art , comprenons-nous bien , je parle d'un objet rangé et exposé , juste sorti pour le montrer , à des gens intéressés ou pour son propre plaisir .
Ce type d'arme a besoin d'un nettoyage 2 à 3 fois par an ( à moins que vous ne le sortiez tous les jours mais bon ....) .

Une lame que vous utilisez pour l'entrainement ou le tameshigiri aura certes besoin d'un entretien plus fréquent .
L'usage d'une lame utilisée en coupe implique qu'elle soit nettoyée à chaque sortie , son contact avec des produits végétaux ( bambou ou paille de riz voir autre ) impose de veiller à ne pas lui laisser de résidus dessus .

L'utilisation d'une lame pour l'entrainement aux katas , autrement dit , au contact de l'air ne nécessite pas un nettoyage à chaque sortie , mais une fois par mois .

Certes , si vous souhaitez nettoyer votre pièce tous les jours , personne ne peut vous en empêcher ni vous en tenir grief .

Simplement , cela risque de vous couter cher , l'huile de clou de girofle , les papiers YOSHINO GAMI ( NUGUIGAMI, NUGUISHI appelez le comme vous voulez ) ne sont pas , pour les véritables , très bon marché .
De plus , un sabre reste un sabre et faire de ce nettoyage une routine peut devenir dangereux , le pouvoir de coupe d'une lame efficiente demeure , et même si vous pensez en avoir conscience , souvenez-vous que les samourais , combattant et tuant avec leur arme possédaient cette conscience solidement imbriquée en eux .

Bien , maintenant , le nettoyage :

D'abord quelques conseils de prévention :

Les contraintes principales :

- NE JAMAIS TOUCHER UNE LAME A MAINS NUES . L'acier est très sensible aux empreintes digitales , celles-ci peuvent laisser des marques indélébiles .
- De même , il ne faut pas s'amuser à passer le pouce sur le HASAKI ou fil .
- Ne jamais utiliser d'outil abrasif ou agressif même pour quelque chose qui parait ardu à enlever .
- Ne jamais repolir une lame avec des moyens mécaniques autres que le polissage traditionnel .

Le nakago est l'image de la vieillesse du sabre , c'est sur lui que l'on voit ses rides et les empreintes du passé autrement dit une part de son identité . Ne jamais nettoyer les soies , sa rouille et sa patine sont primordiales .

Le Matériel :

Il est assez standard et limité comme le montre le croquis joint .

Il est constitué par : Le marteau chasse-goupille nommé MEKUGI NUKI , l'huile ou KATANA ABURA , idéale si elle provient du clou de girofle ou CHOJI ( CHOJI ABURA ), la boule de pierre calcaire ou UCHIKO , du papier de riz NUGUISHI ,un morceau de tissu fin et doux , de la flanelle est idéale .

Détaillons un peu ces " ustensiles" de nettoyage :

- Le MEKUGI NUKI ou TSUCHI : Le coté pointu de ce " petit marteau " sert à chasser la goupille enfoncée ; la masse sert à renfiler la goupille MEKUGI généralement en bambou , corne , chêne ou encore en os voire en métal .

- L'HUILE : la meilleure est l'huile de clou de girofle ou ABURA CHOJI , qui présente un PH idéal et une entière compatibilité avec l'acier de la lame et l'intérieur du fourreau .

- Le PAPIER : NUGUISHI ou YOSHINO GAMI ou NUGUI GAMI : Là j'avoue mon ignorance quant à l'appellation exacte du papier de riz à utiliser .
Les japonais parlent quelque fois de HOSHO pour le définir ; dans le livre de Serge DEGORE , " le NIPPONTO " il est fait
mention de NUGUISHI ; " THE JAPANESE SWORD " de Kanzan SATO , fait mention de YOSHINO GAMI et le terme de NUGUI GAMI semble en être une sorte de synonyme .
Il s'agit en tout état de cause d'un papier de riz robuste et tendre à la fois , peu rigide donc peu abrasif et buvard .

- L'UCHIKO : C'est une boule de tissu ( en soie généralement ) rouge ou blanche , percé de petits trous et remplie de poudre de pierre calcaire composée de pierre à polir de type UCHI GOMORI . On dit que son usage constitue le stade ultime du polissage .

- Le TISSU : Il doit être doux et ne pas pelucher , non abrasif ( éviter l'essui-tout agressif au possible ), de la flanelle voire
de la gaze conviennent parfaitement .

Comment procéder ?

D'abord démonter le KOSHIRAE : celui-ci est en principe facile .
On déchausse la cheville ou MEKUGI de son logement ou MEKUGI ANA et l'ensemble se déboite tout seul .
On enlève la poignée , attention de ne pas endommager les tresses , les SEPPA et la TSUBA , puis le HABAKI en le faisant coulisser sur les soies , et l'on se retrouve , Oh! ciel ! avec une lame toute nue !

Cependant sur des lames anciennes ou ayant beaucoup " voyagées " ce démontage peut s'avérer périlleux . Dans ce cas , une solution existe , elle consiste à tenir le sabre par la poignée , incliner l'ensemble à 45 °, et venir frapper le poignet tenant le sabre avec l'autre main ou encore frapper avec la paume de la main disponible sous l'autre main , le poing étant refermé sur le sabre pour le tenir .

Cette opération suffit le plus souvent . En cas de difficultés prononcées , procéder avec grand soin, en agissant sur la garde avec une planchette de bois et un maillet tout en protégeant la lame avec un textile propre ou du papier type YOSHINO GAMI par exemple . En répartissant les coups des deux cotés , on parvient généralement à ses fins . Cette méthode peut également être utilisée avec un habaki récalcitrant .
SURTOUT PAS DE RECOURS AUX ANTI-ROUILLE ou AUX OUTILS DESTRUCTIFS ( PINCES etc ... ) .

A ce stade , il est intéressant de faire un bilan des pièces démontées :

Passons sur la lame , en effet des désordres sur celle-ci ne sont plus du ressort de l'entretien mais plutot des réparations et dans ce cas , seul un polisseur vous sera utile , à prévoir un cout très élevé , quelquefois le prix de la lame .

Le habaki : s'il est fendu ( souvent coté HA ) , il est nécessaire de le changer, sinon il ne nécessite rien de particulier .

La poignée : si elle n'est pas trop usée , une petite brosse douce , suffira à dépoussiérer la SAME et les MENUKI . Si les tresses sont en mauvais état ( effilochage ) , il faudra se résoudre à les changer ; attention , changer une tresse soi-même n'est pas de tout repos !!

Les diverses montures , fuchi , kashira , tsuba ne doivent pas être nettoyés aux solvants ni aux produits chimiques ou autre pâte à polir . Une éponge avec de l'eau savonneuse pour les nettoyer et un peu de cire d'abeille chaude feront parfaitement l'affaire .

Le fourreau et sa laque se contenteront de l'éponge humide voire très légèrement savonneuse .

Le Nettoyage du sabre :

La première opération consiste d'abord à bien s'installer , dans un endroit si possible à l'écart des gens ( et des enfants ); cela peut paraitre stupide mais j'ai vu un jour un gars nettoyer son sabre sur sa table avec ses enfants en train de jouer autour de lui .

le nettoyage débute par l'enlèvement de l'ancienne huile et des autres salissures se trouvant sur la lame . Pour cela , on utilise du papier de riz , que vous appelez comme vous le souhaitez , pour ma part je le nommerai YOSHINO GAMI . Ce papier buvard , doit pour bien être appliqué être plié , en quatre semble l'idéal .
Le netttoyage s'effectue toujours depuis la poignée en remontant vers la pointe , tranchant vers le haut , lame tenue devant vous .

Après ce nettoyage de surface , on entreprend un nettoyage plus en profondeur , en même temps qu'un traitement curatif de la lame : En effet , comme je l'ai indiqué plus haut , il est souvent considéré que l'utilisation de l'Uchiko , puisque c'est de cela qu'il s'agit constitue le stade ultime du polissage d'une lame .
On incline le sabre , le summum de l'élégance est de posséder un MAKURA , qui est un petit oreiller , un traversin , sur lequel on pose l'extrêmité de la lame durant la séance d'Uchiko .
Celle-ci consiste à tapoter la boule percée sur la lame , toujours depuis le nakago en remontant vers la pointe . Le nombre de tapotements dépend évidemment de la longueur de la lame , mais aussi de l'état de celle-ci.
Personnellement , il m'arrive de faire se chevaucher les tapotements ou de les mettre bout à bout en fonction justement du degré de propreté de mon sabre .
Dans ce cas , pour une lame de 70 cm , le nombre de tapotements est compris entre 30 et 40 de chaque coté .

L'enlèvement de la poudre calcaire s'effectue ensuite au YOSHINO GAMI ( propre bien sur ) .

Les gorges sont à traiter de la même façon avec un papier plié en 8 pour le rigidifier car lui seul est introduit dans la rainure .
Les HORIMONO demeurent aussi des zones à nettoyer précautionneusement ; personnellement j'utilise très doucement car c'est assez pelucheux , du coton tige .
On réalise cette opération de façon à oter toute la poudre et les impuretés qui ont pu s'y acccrocher .

Ensuite , avec le tissu de flanelle ou la gaze , recouverte de katana abura , juste un peu, ça suffit , on ne fait pas des frites ni de la salade , on enduit toute la lame des deux cotés , toujours depuis les soies en remontant vers la pointe .

La lame doit être légèrement luisante recouverte d'une très mince couche d'huile , éviter d'en mettre trop car de toute façon , celle-ci se répandra dans le fourreau tot ou tard et c'est complètement inutile .

Si vous avez démonter votre sabre , remonter le , puis remettez le dans son fourreau et sur son support enfin .

Pour manipuler un sabre , non seulement pour l' éxaminer voire l' expertiser mais aussi pour le nettoyage , il est bon de se procurer un tissu spécifique nommé FUKUSA .